AUBERIVE

MA04 Nécropole nationale française, cimetière militaire allemand & cimetière militaire polonais du « Bois du Puits »

Auberive-MA04-01

La nécropole trinationale du bois du Puits est située sur la R 931, le long de l’ancienne voie romaine, à 30 km à l’est de Reims et à proximité du camp militaire de Moronvilliers. Le paysage et la géologie du site correspondent aux caractéristiques de la Champagne crayeuse : plaine entrecoupée par de vastes ondulations.

Sur une parcelle unique sont réunis une nécropole française, un cimetière polonais et un cimetière allemand. Son plan dessine un T retourné et bordé de résineux. Les trois nécropoles reposent sur une seule et même parcelle.

Auberive-MA04-02

La nécropole française s’étend sur une superficie est de 23.461 m² et se présente sous la forme de tombes individuelles (3516) et de 3 ossuaires où reposent les restes de 2908 français, soit au total  6 424 soldats français. Au fond du site, le cimetière allemand s’étend sur 9529 m2 et 5.359 corps y sont inhumés, la plupart en ossuaire.

Les alignements de croix latines et de stèles musulmanes de la nécropole française la différencient peu du cimetière polonais mitoyen où se dressent également des croix latines en béton. Ce dernier compte 129 sépultures de la guerre 14-18 et 256 stèles du second conflit mondial disposées de part et d’autre du monument commémoratif polonais de la première et Deuxième Guerre mondiale surmonté d’une croix. A droite de l’entrée du cimetière, a été édifié un petit monument aux morts de la Première Guerre mondiale.

Auberive-MA04-03

Mitoyen des deux cimetières, à l’arrière-plan, entouré d’arbres, s’étend le cimetière allemand  où 5359 corps sont inhumés. Il se distingue des deux autres par ses croix latines et ses stèles juives en pierre et son ossuaire massif et imposant, 3124 corps y reposent.

Auberive-MA04-04

Ce champ funéraire est établi sur le lieu d’affrontements dès 1914. Auberive constitue alors la limite ouest du front d’attaque de l’offensive française de Champagne en septembre-octobre 1915 laissant en ruines le village. À une centaine de mètres en avant du site funéraire se trouvait le bois des guetteurs, qui était la première ligne française avant l’offensive d’avril 1917. Il s’agissait du seul endroit du front où une tranchée française dominait légèrement celles des Allemands. A l’horizon, s’étendait la ligne des monts : le Mont sans Nom, le Téton, le Casque, le Mont Haut, ainsi que le Mont Blond et le Mont Cornillet, enjeu de terribles combats lors de l’offensive française du 17 avril 1917. Ce secteur fut aussi le théâtre de la dernière offensive allemande de juillet 1918 où fut engagé pour la première fois le 1er régiment de chasseurs polonais. Plus à l’est, vers Aubérive, la distance entre les tranchées était plus espacée. Cette zone, appelée « golfe » était propice à de nombreux « coups de main » et objet de nombreux combats d’où cet imposant ensemble funéraire.

La nécropole française est créée par la commission des sépultures de guerre après le conflit pour donner une sépulture à tous les combattants morts lors des batailles de Champagne de 1914-1918. Elle est officiellement ouverte en 1920, d’où son plan classique et compte d’abord un millier de tombes. A partir de 1920, y sont regroupés les corps provenant des cimetières provisoires et des tombes isolées de : La Voie romaine, la Ferme de Moscou, le Village Gascon, l’Estival, le mont sans Nom, le mont Blond, le Mont Haut, le mont Cornillet, le mont du Casque, le mont Téton, le Bois Sacré, le bois Liévin, le bois de la Chapelle et le bois du Puits. De 1923 à 1926, elle est réaménagée et agrandie pour regrouper les corps exhumés des cimetières militaires dits provisoires situés à l’est de Reims de la région d’Auberive et des Monts de Champagne. En 1927, on édifie l’entrée aux pilastres en pierre et on plante des rosiers sur les tombes individuelles, rosiers  disparus aujourd’hui.

Le cimetière polonais  répond au souhait exprimé en 1922 par le ministre de la Guerre polonais, de rassembler les corps des soldats polonais tués en France dans un cimetière spécialement créé pour eux en terre française, les autorités françaises proposèrent d’abord en 1923, le site de Prosnes (Marne) mais il fut écarté, au profit de celui du cimetière militaire français d’Aubérive. Ouvert en 1923, les inhumations durèrent de 1923 à 1926. Dans les années 1930, le cimetière fut embelli : construction d’un petit monument commémoratif ; les croix de bois furent remplacées par des croix en ciment et un portail installé. Ces travaux donnèrent au cimetière son aspect actuel. En 1991, le Monument commémoratif polonais des deux guerres mondiales a été rénové par la Fédération des anciens combattants polonais en France.

Ce cimetière est emblématique de la naissance de la Pologne et de l’armée polonaise. L’engagement de volontaires polonais dans la Légion étrangère sur les champs de bataille de l’Artois et de Champagne puis au sein de la Légion polonaise témoigne de la volonté de ces derniers  de conquérir une légitimité nationale propre en adhérant à la cause des Alliés. La France reconnaît implicitement la nation polonaise le 4 juin 1917 par un décret présidentiel officialisant la création d’une armée polonaise en France. Au cours d’une cérémonie au camp de Mailly et afin d’appuyer cette reconnaissance, le président Raymond Poincaré remet aux soldats polonais un drapeau national, accueillant ainsi la première unité polonaise au sein de l’armée française. Leur engagement et leur mort portent en germe les espoirs d’une nation dont l’indépendance est proclamée le 11 novembre 1918.

Parallèlement, à l’ouverture de ces deux nécropoles, l’Etat crée le cimetière allemand pour donner à ces combattants une sépulture digne. Le cimetière est réaménagé  par le VDK en 1972. La tempête de 1999 ayant déraciné des hauts sapins formant son enclos végétal, une haie y a été récemment plantée afin de le reconstituer.

Cet ensemble funéraire est le lieu de multiples commémorations : dépôt de gerbe chaque 11 novembre à l’initiative de la municipalité d’Aubérive et chaque année une cérémonie polonaise a lieu en juin ou juillet, organisée par l’Amicale régionale franco-polonaise et l’association des anciens combattants polonais de Troyes. Une messe en plein air est célébrée en polonais et en français par un aumônier polonais, elle est suivie d’un dépôt de gerbe.