SAINT-DIE-DES-VOSGES

VS03 Nécropole nationale française des Tiges

La nécropole nationale des Tiges est l’une des dix nécropoles nationales implantées sur le territoire des Vosges. Située à l’écart de la ville, à la Tête de la Béhouille (cote 376), la nécropole  se découvre seulement après que l’on ait gravi le haut escalier donnant accès à l’entrée du cimetière.

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Ce dernier, entièrement engazonné et bordé par la forêt, épouse la topographie du site. De plan rectangulaire, sa scénographie simple évoque le type même des nécropoles créées par la loi de 1920. Dans l’axe de l’allée centrale s’élève le monument aux morts, 1914-1918 en grès local. Il  se dresse à sa partie sommitale orné de l’épée de la victoire et d’un bas-relief  en bronze, représentant un soldat tombé. A l’arrière est érigé le monument des Chasseurs alpins, monument symboliquement sculpté en pierre du Mont-Blanc (granit), hommage du « 11ème et 51ème bataillon de Chasseurs alpins, à la mémoire de leurs camarades tombés à Saint-Dié en août 1914 ». De part et d’autre de ces monuments  se répartissent de façon symétrique les 1385 stèles, de la première guerre mondiale et 15 stèles de 39-45, selon deux sections ainsi que les deux ossuaires en grès rose dont les monuments art déco portent le nom des régiments.

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Très fleuris, 1182 corps y reposent soit 580 par ossuaire. Ce cimetière possède quelques spécificités : ses croix latines, en béton rosé, disposées dos à dos et des sépultures suscitent un regard particulier. Parmi ces dernières, on observe celle d’un soldat malgache, la sépulture d’un soldat alsacien mort sous l’uniforme allemand, mais surtout celles de deux fusillés par erreur bénéficiant de la mention mort pour la France et deux tombes de gradés ornées chacune d’une plaque spécifique posée sur la croix avant la fin du conflit. Cette  pratique rompt avec  la tradition d’uniformité des signes dans les nécropoles.

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Cette nécropole répond aux principes architecturaux des nécropoles créées par la loi du 31 juillet 1920. Ainsi de 1920 à 1924 sont regroupés dans le cimetière des Tiges des soldats morts (3000 environ) lors des combats  qui se sont déroulés à et autour de Saint-Dié, notamment dans le secteur des Tiges, en août-septembre 1914. Elle est agrandie en 1924 pour y regrouper les corps exhumés des cimetières militaires communaux de Saint-Dié, de ses environs et de nombreux cimetières provisoires des cols vosgiens (col du Haut-Jacques, col de la Culotte, bois de la Madeleine, col du Chariot, col du Donon, etc.). A ces regroupements s’ajoutent ceux du carré des fusillés (les dépouilles de fusillés sont à présent dans l’un des deux ossuaires), en provenance de : Saint-Dié, Vanémont[1], Gérardmer, Les Rouges-Eaux, Anould.

Pour rendre hommage aux morts, l’Union nationale des Combattants y édifie en 1927 le monument aux Morts, orné d’un bas-relief à la mémoire du 99e RI, sculpté par le lyonnais Jean Louis Chore offert par la ville de Lyon. Elle est réhabilitée en 1972 et le monument aux Chasseurs alpins y est élevé faisant mémoire à ces bataillons très spécialisés.

Mais son exceptionnalité est avant tout immatérielle : elle résulte de la présence d’une tombe de fusillé, portant la mention « Mort pour la France », celle de Jules Frédéric Poignant (1872-1917), du 43e régiment d’infanterie territoriale, passé par les armes le 20 août 1917 pour « abandon de poste en présence de l’ennemi » (d’abord inhumé le 20 août 1917 dans le cimetière rive droite de Saint-Dié).

S’y trouve également la tombe du sergent-major Georges-Albert Haffa (1884-1914), du 23e RI, qui a préféré se donner la mort en prison plutôt que d’âtre fusillé. Son bataillon étant décimé, il avait erré avec d’autres soldats. Arrêté le 23 septembre 1914 pour « abandon de poste en présence de l’ennemi », il est condamné à être fusillé le 12 octobre. Enterré dans une nécropole de la rive droite, il est inhumé en 1928 dans la nécropole des Tiges. Sa tombe porte la mention « Mort pour la France ».

Les restes des autres fusillés aujourd’hui inhumés en ossuaire proviennent vraisemblablement dans des fosses communes relevées après la guerre. Ceci fait de la nécropole de Saint-Dié une nécropole témoignant de tous les rites funéraires déployés tant à l’égard des morts de guerre que des victimes militaires de guerre et de leur destin post mortem. Des commémorations s’y déroulent régulièrement en présence des autorités locales.

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[1] Dans ce cimetière provisoire était inhumé jusqu’en 1921 le soldat Eugène Bouret, né en 1887, exécuté le 7 septembre 1914 et premier fusillé réhabilité le 2 août 1917 après que les autorités aient reconnu que son abandon de poste était due à un choc psychique subi au combat. Son corps est exhumé et réinhumé dans la nécropole de Saulcy en avril 1921 puis  rapatrié en octobre 1921 à la demande de la famille et inhumé aujourd’hui au cimetière des Péjoces à Dijon, emplacement G 228.