MA02 Cimetière militaire italien « de Bligny »
Edifiée sur la Montagne de Bligny, la nécropole italienne a été créée sur une position stratégique du champ de bataille de 1915, devenue emblématique, que la nature a reconquise. Elle s’ouvre sur un magnifique panorama au paysage d’openfield multicolore, mosaïque de vignes, de cultures et de prairies aux aspects changeants au gré des saisons et de l’ensoleillement.
Sa morphologie et, sa scénographie d’inspiration néo-classique, épousent le relief formant éperon, sorte de belvédère, entre la vallée de l’Ardre à l’Est et la vallée du d’Hoyau à l’Ouest. En ce lieu impressionnant, reposent 3440 soldats italiens dont 3040 en sépultures individuelles et 400 en ossuaire. Là sont inhumés également 400 travailleurs italiens. C’est le plus grand cimetière italien de France. Les emblèmes blancs, croix latines, sont fixés sur des longrines apparentes, chacune portant une plaque en cuivre d’identification scellée. Sa grande allée bordée de cyprès centenaires conduit au petit temple-ossuaire, de style néo-classique inspiré de l’ordre dorien élevé en son centre. Son autel permet de célébrer des messes lors des commémorations.
A l’arrière de ce dernier, à l’extrémité de l’allée, une tombe isolée dominée par une grande croix. A l’écart, à droite de l’entrée du cimetière, un bas-relief en bronze célèbre la mémoire des Garibaldiens morts en 1914-1915 dans l’Argonne et dont 66 dépouilles sont inhumés dans ce cimetière. Il est l’œuvre du sculpteur Alberto Cappabianca, ancien capitaine de la Légion garibaldienne, et la plaque de bronze celle des fonderies Codari et Dubru. Trois victoires ailées en bronze rappellent les lieux de leur engagement : Bolante, Courtes-Chausses, Meurissons. Leurs tombes sont dispersées dans les 8 carrés composant le cimetière. Un muret de pierre aux assises marquées ceinture le lieu: ponctué de pilastres portant des casques signalant le caractère militaire du lieu, ses piliers d’angle plus hauts que les autres sont ornés d’une urne funéraire.
Le cimetière est créé officiellement en 1919, sur la montagne de Bligny, là où le 2ème Corps italien, est engagé durant la 2ème bataille de la Marne à l’été 1918. Point central du dispositif italien, les pertes le 15 juillet 1918 sont considérables. Après la bataille un millier de corps sans vie y sont récupérés, soit un sixième des pertes totales italiennes en France. Ils sont ensevelis sur place dans des tombes provisoires et dans les cimetières civils. Après la guerre, les aumôniers italiens procèdent à leur recensement et à leur identification, puis sont inhumés dignement dans le cimetière ouvert en 1919. Puis, il devient le grand cimetière de regroupement national. On y transfère en 1920, les corps des travailleurs de l’armée italienne morts sur l’ensemble du front à partir de 1917. Inauguré en 1921, en présence du maréchal Foch et du général Albricci, les travaux d’aménagement s’y poursuivent jusqu’en 1927. Puis, on y regroupe les dépouilles des Garibaldiens morts en 1914-1915 dans l’Argonne, où demeure à Lachalade un monument élevé en leur mémoire. Cette légion fait référence à Giuseppe Garibaldi, un des principaux acteurs de l’unification de l’Italie et dont six de ses petits-fils ont combattu dans la Légion garibaldienne dont deux sont morts Argonne : Bruno et Constante. On y transfère également la tombe d’Ugo Maganani, général italien mort à Cassel en 1917. Cependant les corps inhumés dans le petit cimetière de Soupir, et les corps des blessés et des prisonniers décédés dans les hôpitaux du front n’ont pas été rassemblés à Bligny.
Chaque année, une cérémonie franco-italienne du souvenir est organisée en septembre à l’initiative du Consulat d’Italie. Le 15 juillet 1988, le sous-secrétaire d’Etat Italien à la défense et le secrétaire d’Etat chargé des anciens combattants et des victimes de guerre ont rappelé ensemble cette page de mémoire commune des deux nations italiennes et françaises. Le 19 septembre 2015, un hommage singulier fut rendu aux volontaires Garibaldiens à l’occasion du centenaire en présence d’un détachement du 1er Etranger et de Madame Anita Garibaldi.
Le poète et romancier Curzio Malaparte, engagé dans la Légion garibaldienne, participe à cette bataille (blessé par gaz). De cette expérience combattante, il écrit le poème « Les morts de Bligny jouent aux cartes ». Et, à noter que le dernier combattant décédé de nationalité française de la Grande Guerre, Lazare Ponticelli, fut l’un des défenseurs de ce lieu.